La voix, ϕόνή des Grecs, vox des Latins, peut être définie: la vibration sonore que produit l’air expiré, en traversant le canal laryngo-buccal.
La voix se distingue en voix parlée et voix - chantée.
— La parole se compose de l’articulation des lettres et de la prononciation des mots d’une langue, par les mouvements combinés du larynx de la langue et des lèvres.
— Le chant, selon le physiologiste, est l’émission de sons variés et modulés, au moyen du jeu des différentes pièces de l’appareil vocal; selon le musicien, c’est la faculté de parcourir avec la voix, toutes les notes des diverses échelles musicales.
Pour bien se rendre compte du merveilleux instrument de la voix humaine, il est nécessaire d’en étudier l’anatomie et la physiologie, c’est-à-dire, la structure et le mécanisme fonctionnel des diverses pièces qui le composent; il est également indispensable à ceux qui désirent pratiquer cet instrument et en connaître les ressources, de s’instruire aux leçons de professeurs éclairés de gymnastique vocale, car eux seuls peuvent en aplanir les difficultés et en développer les richesses.
Énumération et description sommaire des organes de la voix.
L’appareil vocal ou phonateur se compose de quatre parties distinctes.:
1° Les poumons, faisant office de soufflet.
2° La trachée, remplissant le rôle de porte-vent.
3° Le Larynx, constituant la glotte où se produit la voix.
4° Le tuyau vocal, formé par le pharynx et la bouche d’où sort le son.
Le poumon est un organe double, essentiellement spongieux, qui remplit la cavité de la poitrine. Le poumon droit présente trois lobes; le gauche deux seulement. Le tissu pulmonaire se compose, en grande partie, d’une quantité considérable de ramifications bronchiques qui, arrivées à l’état de capillaires, se terminent par de petites vésicules aériennes. Un poumon débarrassé de son tissu nerveux et vasculaire, par la dissection, de manière que les ramifications bronchiques aient été seules conservées, ressemble beaucoup à une branche d’arbre, donnant naissance à une infinité de ramuscules.
La trachée est un tube, de 130 à 150 millimètres de longueur, composé de 18 à 20 petits cerceaux cartilagineux, tronqués postérieurement où ils sont complétés par une membrane fibreuse. La trachée monte verticalement, en avant de la colonne vertébrale, pour s’adapter au larynx; sa partie inférieure se bifurque en deux tubes qui entrent dans le poumon droit et gauche où ils se divisent en ramifications bronchiques innombrables. Ces ramifications entièrement cartilagineuses constituent le parenchyme des poumons.
Le larynx est une espèce de boîte cartilagineuse qui coiffe, pour ainsi dire, la trachée. Son ouverture supérieure ou pharyngienne s’ouvre dans la bouche; l’ouverture inférieure ou trachéale communique avec la trachée. L’ouverture supérieure du larynx, de forme triangulaire, a reçu le nom de glotte; elle est susceptible de s’élargir, de se rétrécir, et même de se fermer complètement; c’est dans la glotte que se passe le phénomène du son.
Composition du larynx. — Le larynx est composé de cartilages, muscles, cordes vocales, membranes, vaisseaux et nerfs.
Figure 1.
Larynx vu de profil, préparé pour donner au lecteur
une idée de la structure de cet organe.
Les cartilages sont au nombre de cinq:
1° Le cricoïde, ainsi nommé à cause de sa ressemblance avec un anneau.
2° et 3° Les aryténoïdes ayant la forme d’un entonnoir, et servant de point d’attache aux cordes vocales. Ces cartilages forment la pièce la plus essentielle de l’appareil phonateur.
4° Le thyroïde, ressemblant à un bouclier; c’est le plus considérable de tous; il forme chez l’homme ce qu’on appelle vulgairement la pomme d’Adam.
5° L’épiglotte, cartilage plus flexible que les autres s’abaissant sur la glotte, au moment du passage des aliments dans le pharynx, et se relevant ensuite par sa propre élasticité.
Les muscles du larynx se divisent en plusieurs groupes, auxquels on a donné les noms de muscles élévateurs, abaisseurs, constricteurs, tenseurs, détenseurs, dilatateurs. Ces noms déterminent leur propriété, c’est-à-dire leur mode d’action.
Figure 2.
Larynx préparé pour démontrer les cordes vocales dans leur état de tension.
A. Reste du cartilage aryténoïde.
B. Reste du cartilage thyroïde dont la plus grande partie a été enlevée.
C. Ligaments ou cordes vocales.
D. Membrane interne du larynx.
E. Cartilage cricoïde.
F. Premiers anneaux de la trachée artère.
Cordes vocales. — Ces cordes sont formées par de petits ligaments élastiques essentiellement sonores, qui s’attachent aux parois des cartilages aryténoïdes. Leur tissu diffère de tous les autres tissus, non seulement par la couleur et la composition chimique, mais encore par la disposition des fibres. — La longueur moyenne des cordes vocales, chez l’homme, est, pendant le repos, de 18 1/4 millimètres; chez la femme de 12 2/3. Ces cordes ou ligaments offrent au maximum de leur tension, chez l’homme: 23 1/6 millimètres; chez la femme 15 1/3.
Aux cordes vocales seules ne se borne pas le tissu élastique et sonore; les ligaments qui attachent les différentes pièces du larynx, ainsi que les fibres longitudinales de la menbrane qui revêt les bronches et la trachée, sont également formés d’un tissu élastique, de telle sorte que toutes les parties de la glotte sont susceptibles de vibrations et de résonnance.
Les expériences de quelques physiologistes tendraient à établir que les cordes supérieures n’ont point la même importance que les cordes inférieures, dans la production des sons de poitrine et de tête: la section de ces cordes n’entraîne pas la perte entière de la voix, tandis que la section des cordes inférieures amène toujours l’aphonie complète.
Membranes. — Outre la membrane muqueuse qui tapisse l’intérieur du larynx, il existe une autre membrane à tissu élastique, servant à revêtir les ventricules, et concourant à la formation des cordes vocales.
Le nerf laryngé joue un grand rôle dans la phonation; si l’on coupe, chez un chien, les filets de ce nerf qui vont animer les muscles tenseurs et constricteurs, aussitôt les cordes se relâchent, et la voix devient rauque; mais si l’on remplace l’action des muscles en rapprochant les cartilages, à l’aide d’une pince, la voix se fait entendre de nouveau dans sa pureté naturelle.
Les ventricules du larynx, aussi dénommés ventricules de Morgagni, semblent n’avoir d’autre usage que celui de donner de l’espace aux cordes vocales, et de leur permettre de vibrer en liberté.
L’appareil phonateur est diversement construit, chez les animaux; les mammifères les plus rapprochés de l’homme, les singes, par exemple, possèdent un larynx presque semblable au nôtre; la seule différence est dans-une ouverture qui existe entre les cartilages et va s’ouvrir dans un sac membraneux, appelé sac laryngé. D’autres quadrumanes sont munis d’une large caisse hyoïde, communiquant au larynx et imprimant à l’air expiré une vibration puissante; on les a nommés hurleurs. — Cette conformation est peut-être la cause qui prive les singes de la faculté de parler; car lorsqu’ils veulent crier, une grande partie de la colonne d’air expiré, s’engouffre dans le sac laryngé d’où il résulte un cri monotone, rauque et désagréable. Il serait très curieux d’expérimenter si, en pratiquant une opération propre à fermer l’ouverture qui existe entre les cartilages du larynx de ces animaux, on arriverait à leur faire articuler des mots?
Les oiseaux, possèdent deux larynx, l’un supérieur, l’autre inférieur et trois glottes successives. Ce mécanisme offre quelque analogie avec celui de la flûte, d’où résulte cette faculté, particulière à quelques oiseaux chanteurs de moduler des sons que l’homme n’imite que très imparfaitement. — Les oiseaux, à long col ont une trachée formée de plusieurs anneaux entiers; une membrane fortement tendue sur le premier anneau constitue ce que les zoologistes nomment le tambour. Leur larynx, entièrement osseux, ne leur permet qu’un seul cri d’une raucité et d’une monotomie fort désagréable: le paon, l’oie, le canard, le vautour, etc.
Aucun des animaux vivants n’offre des cordes vocales semblables à celle de l’homme. Chez les uns elles sont plus grêles, plus courtes et moins marquées; chez les autres elles sont plus épaisses, plus rapprochées et presque confondues. Les êtres moins avancés dans la série animale en offrent à peine les rudiments. Les reptiles, dont les cordes vocales sont membraneuses, ne peuvent effectuer qu’un sifflement. Chez les êtres privés de l’organe pulmonaire, l’appareil vocal n’existe point; un orgue sans soufflet serait complètement muet. Les poissons, hormis quelques-uns, et les nombreuses familles d’insectes étant dépourvus de poumons, ne font entendre qu’un bruit produit par une membrane appelée vibrateur; la cigale, le grillon, etc. sont dans ce cas.
Partie du larynx où se produit la voix. Les observations recueillies sur l’homme vivant et les expériences faites sur des larynx d’hommes et d’animaux morts, démontrent positivement que le phénomène du son se passe dans la glotte même, ni au-dessus, ni au-dessous. Lorsqu’on fait une ouverture à la trachée d’un animal vivant, la voix cesse aussitôt et revient dès qu’on bouche cette ouverture. Si l’on pratique une ouverture au-dessus du larynx, le son a lieu comme avant; mais au lieu de sortir par la bouche, il sort en grande partie par l’ouverture.
Comment se produit le son. — Nous traiterons cette question, dans tous ses détails, au chap. 3; ici nous nous bornerons à dire que le poumon sert de soufflet, la trachée de porte-vent et les cordes vocales représentent des anches membraneuses. Ces cordes, tendues par de petits muscles, sont mises en vibration par le courant d’air sorti du poumon, et ces vibrations varient du grave à l’aigu, selon que la glotte se dilate ou se resserre, que les cordes se tendent ou se relâchent.
On entend par ce mot le caractère propre, la nature essentielle du son vocal. Chaque individu a son timbre de voix. Cependant l’homme peut, jusqu’à un certain point, imiter le timbre de ses semblables; c’est ce qui arrive lorsqu’un individu veut en singer un autre.
D’après les physiologistes les plus experts, le timbre de la voix dépend de certaines conditions générales de l’organisme, et de l’action spéciale de toutes les pièces de l’appareil vocal; c’est-à-dire de la forme et de la composition des voies aériennes, ainsi que des membranes et de leur résonnance; de la capacité de la glotte, du degré de longueur et de largeur du larynx, des sinus frontaux et maxillaires, des cavités nasales et du mode spécial de cohérence des cordes vocales; enfin, c’est de l’action isolée ou combinée du larynx, du pharynx, du tuyau buccal, du voile du palais et des fosses nasales, pendant l’émission du son, que résultent les variétés de timbre dans l’espèce humaine.
Le timbre de la voix, dans l’échelle zoologique, sert à distinguer le sexe et les espèces. Le timbre de l’homme diffère de celui de la femme. Le chien, le cheval, le taureau, etc., ont un timbre qui leur est propre; il suffit d’entendre le cri des divers animaux pour deviner le genre auquel ils appartiennent.
Il existe des rapports intimes entre l’appareil vocal et les organes génitaux: le timbre est grêle, aigre, perçant depuis l’enfance jusqu’à la puberté, à cause du peu de longueur des cordes vocales, de l’étroitesse de la glotte et du développement incomplet des cavités nasales.
La puberté augmente en tous sens le diamètre de ces parties alors la voix devient rauque, enrouée; c’est l’époque de la mue pendant laquelle on doit défendre l’exercice du chant qui pourrait provoquer d’assez graves accidents. Après la puberté, l’influence génitale existe toujours; l’abus des plaisirs amoureux altère le timbre et peut entraîner la perte de la voix: c’est ce que nous aurons occasion de démontrer physiologiquement au chapitre de cet ouvrage traitant de l’hygiène générale.
Dans plusieurs contrées l’homme n’a pas craint de porter un fer criminel sur de jeunes sujets, afin de prévenir chez eux la puberté. La castration, à cet âge, arrête le développement du larynx et la voix conserve toujours les sons grèles et flûtés de l’adolescence. Pendant longtemps l’usage exista en Italie de mutiler un certain nombre d’enfants mâles; on a porté ce nombre à quatre mille! ce qui nous paraît exagéré. Les femmes ne pouvant faire partie des chanteurs employés dans les églises, le but de ces mutilations était de leur fournir des voix de soprano. Les théâtres aussi et même les seigneurs avaient leurs castrats; ce ne fut qu’au 18e siècle que le pape Clément XIV abolit cet usage immoral et barbare.
Après la puberté et à mesure qu’on s’avance dans l’âge viril, le timbre se développe, devient mâle et sonore. Chez le vieillard le timbre perd sa pureté, la voix se couvre,la parole sort lente, cassée, chevrotante, à cause de l’altération que subissent les deux systèmes génital et vocal.
Le timbre de la femme est clair, velouté, suave; celui de l’homme est moins doux, mais plus plein, plus retentissant; le premier a quel que chose de tendre, de voluptueux; le second, plus énergique, semble fait pour le commandement.
Les tempéraments établissent aussi des différences dans le timbre de la voix: en général, l’homme sanguin, à large poitrine, possède une voix mâle et forte; celle du bilieux est passionnée, stridente, métallique; le lymphatique la traîne mollement, quelquefois avec une nonchalance qui a ses charmes; chez le mélancolique on trouve des modulations plaintives, une accentuation douce et langoureuse; dans le timbre de l’atrabilaire, il y a quelque chose de sombre et de sépulcral.
Comme il existe assez généralement une relation intime entre le timbre et les langues parlées, on a dit que l’Arabe et l’Allemand se reconnaissaient à leur timbre guttural; — le Français, à son timbre clair; — l’Italien et l’Espagnol, à leur timbre sombre. La raison de ces faits serait que les langues Arabe et Allemande abondent en articulations gutturales; les langues Italienne et Espagnole fourmillent de mots qui ne peuvent bien se prononcer qu’avec la voix sombrée; la langue française renferme une grande quantité de mots où se trouvent les articulations i et u, qui exigent le timbre clair. La diphthongue ou, si fréquente dans les langues Italienne et Espagnole, nécessite le développement complet du tuyau vocal. D’après Kœmpelen, si la longueur du canal oral est de 1 dans la prononciation de la voyelle i, elle monte à 5 pour l’articulation de la diphthongue ou.
L’éducation que l’homme reçoit et ses différentes évolutions dans l’ordre social, impriment aussi leur cachet sur son timbre vocal. — Les artisans, paysans, marins etc., habitués à parler fortement et brusquement, ont le timbre sec, dur, et bruyant, tandis que celui du citadin oisif est doux, peu élevé ; il annonce quelque chose de prétentieux, de maniéré et parfois de ridicule. On a avancé que l’être difficile et brutal avait un timbre dur, aigre ou glapissant, tandis qu’il était harmonieux, tendre et flatteur chez l’individu d’un caractère opposé. Quelques observateurs ont même prétendu que les personnes affligées d’une voix et d’un timbre faux avaient rarement le jugement juste?
Force de la voix. — La dimension et l’élasticité des cordes vocales, un ample développement de la glotte du conduit oral et des cavités de retentissement, la résonnance des membranes qui les tapissent, une large poitrine, des poumons vigoureux dans leurs mouvements d’inspiration et d’expiration, sont les conditions d’une voix forte; car ainsi que nous l’avons dit, les poumons sont au larynx ce qu’un soufflet est au tuyau d’orgue. Au contraire, l’étroitesse de la poitrine, les engorgements, les tubercules du poumon et toutes les affections chroniques de cet organe, rendent la voix faible. En général, tous les agents qui peuvent altérer les muqueuses bronchiques et laryngo-buccales, portent une fâcheuse atteinte à la force et à la sonorité de la voix. Le silence absolu trop longtemps prolongé, débilite les organes respiratoires et exerce par conséquent une influeuce très sensible sur le timbre et les qualités de la voix.
La parole est la voix articulée au moyen des lèvres, de la langue et du voile palatin. La parole n’a lieu qu’à partir de l’arrière-bouche; le voile du palais forme la limite des deux phénomènes de la phonation: la voix chantée et la voix parlée.
Les éléments de toute langue sont composés de deux ordres de signes, les voyelles et les consonnes qui, diversement combinées entre elles, produisent toutes les modifications phoniques du langage.
Notre langue possède cinq voyelles radicales: a-é-i-o-u. Les cinq analogues â-ê-î-ô-û qui s’y rattachent peuvent être comparées aux demi-tons de la gamme, et les cinq voix nasales an-en-in-on-un ne sont que le résultat de la combinaison.
La voyelle est un son de la voix qui, se formant dans la glotte, traverse la bouche, et sort par l’ouverture des lèvres. La différence de son entre les cinq voyelles, est causée par la dilatation ou le resserrement de la glotte, et par le passage plus ou moins large que la langue et les lèvres accordent au son. — Les consonnes n’ont de sons que ceux qu’elles empruntent aux voyelles; leur articulation isolée ne fait entendre qu’un sifflement, un souffle, un bruit sourd. — Les voyelles sont formées par de simples modifications laryngo-buccales, tandis que les consonnes ont besoin du concours de la langue, des dents et des lèvres.
Les consonnes de notre alphabet sont au nombre de vingt-une: b-c-ch-d-f-g-h-j-k-l-LL (mouillées) m-n-p-q-r-s-t-v-x-z.
Relativement à la variété des articulations, l’alphabet de chaque langue est plus ou moins riche; l’alphabet grec est plus riche que le nôtre, puisqu’il possède les lettres ϕ-θ-χ, articulations douces et agréables dont nous sommes privés. Il serait à désirer qu’on révisât notre alphabet, afin d’en supprimer deux lettres inutiles C et Q. Le c pouvant être remplacé par k lorsqu’il est dur, par s lorsqu’il est cédillé ; le a pouvant toujours être remplacé par le k: Le θ et le x entreraient dans notre alphabet en remplacement de ces deux lettres supprimées.
Plusieurs classifications ont été établies pour les consonnes; les unes dérivent du bruit que produit l’articulation des consonnes; les autres tirent leur nom des organes vocaux qui concourent à leur formation. On les a donc distinguées en:
1° Labiales. — B-P-M — parceque l’émission de ces lettres est exclusivement produite par les lèvres. — B et P ont été nommées explosives, parcequ’elles exigent une poussée d’air et la séparation instantanée des lèvres. M a aussi été classée dans les nasales.
2° Dento-linguales. — D-T — formées par l’application de la langue sur les dents incisives supérieures, et son retrait instantané.
3° Dento-labiales. — F — V — formées par la poussée d’air, les dents incisives supérieures étant appuyées sur la lèvre inférieure.
4° Palato-lingunies. — L-N-R — formées par la langue et le palais. — N a aussi été classée parmi les nasales, et R a reçu la dénomination de vibrante, parceque son émission s’accompagne d’une vibration marquée de la langue.
5° Gutturales. — C-K-Q — provenant de la poussée d’air brusque à l’isthme du gosier, la base de la langue étant relevée.
6° Liquides. — ll mouillées comme quille, bille.
7° Sifflantes. — Ç-S — produisant un sifflement.
8° Gutturale-sifflante. — X.
9° Soufflante. — G-J-CH.
Une classification exacte ne saurait être établie, que par le physiologiste qui a étudié le mécanisme des diverses pièces concourant à l’émission de la parole. Jusqu’ici les classifications grammaticales sont défectueuses, parce qu’elles ont été établies par des grammairiens parfaitement étrangers au mécanisme de l’appareil phonateur.
Le lecteur pourra se rendre compte, d’une manière très imparfaite sans doute, du mécanisme de l’émission, en faisant la gymnastique de chaque lettre de l’alphabet, et en observant attentivement le jeu et les situations des diverses pièces de l’appareil vocal. Ainsi a se prononce la bouche entièrement ouverte et la langue abaissée. — a est un son guttural. — é donne un son palato-lingual, c’est-à-dire qu’il est nécessaire, pour le former, que la base de la langue s’élève, tandis que sa pointe s’appuie contre les incisives de la mâchoire inférieure. — Le son du b et du p se produit avec les lèvres; — celui du d et du t avec la langue qui, appliquée contre les incisives de la mâchoire supérieure, se retire tout-à-coup, etc. etc. Chaque lettre, chaque articulation a son mécanisme différent.
Les langues où les voyelles abondent, sont les plus sonores, les plus euphoniques; celles au contraire qui sont embarrassées de consonnes, offrent de la dureté, de la dysphonie. Ces différences entre les langues ont donné lieu a ces axiomes: — La langue GRECQUE, harmonieuse et poétique par excellence, est la langue des poètes et des dieux. — La langue ITALIENNE, riche en voyelles, est celle de la musique. — L’ESPAGNOLE, pompeuse et sonore dans ses finales, grave, majestueuse dans son débit, est la langue des orateurs; — L’ANGLAISE, qui produit de nombreux sifflements, est la langue des oiseaux; — L’ALLEMANDE, péniblement surchargée de consonnes, est la langue des chevaux et des ours; — La FRANÇAISE, intermédiaire à ces extrêmes, pourrait être nommée la langue des savants; car, en France, où les sciences et les arts ont fait de si grands progrès, où de hautes intelligences ont arrêté la composition de tous les genres d’idées, la langue est désormais précise et fixée.
Plusieurs érudits ont fait de longues et d’inutiles recherches pour découvrir quelle fut la langue originelle, la langue mère, celle que parla la premier homme. Les uns ont avancé que ce fut l’idiôme phrygien; les autres se sont prononcés pour le chaldéen, mais sans aucune donnée certaine. Ce problème de l’histoire philologique, caché sous un voile épais, reste encore à résoudre.
Quel que fût l’idiôme primitif, il dut être aussi simple, aussi borné que les hommes qui le parlèrent. Si nous remontons à l’époque des premières sociétés, nous découvrons que les besoins de l’homme sont peu nombreux, et par conséquent les idées peu composées; les premiers mots qu’ils articulèrent furent probablement une espèce d’harmonie imitative que leur fournissaient les êtres et les choses qui développaient en eux des idées; ils désignèrent peut-être le chien, le cheval, le bœuf, etc., par des noms qui imitaient leur cri; le tonnerre par un grondement; le vent par un sifflement, etc. Le savant Court de Gébelin a dit avec raison: Nous sommes partis d’un seul principe, l’imitation. L’homme a eu un modèle pour parler, la nature. L’imitation dut être la base de toute langue, et ce langage d’imitation, enseigné par la nature, est intelligible à tout le monde.
L’amour cette grande passion que la nature alluma dans le cœur de tous les êtres, afin de perpétuer leur race, l’amour dut aussi puissamment contribuer à l’invention du langage. Ce furent d’abord des gestes, des cris, des sons diversement modulés, ensuite des articulations monosyllabiques, et puis des mots, rudiments de phrases, pour se communiquer les sensations éprouvées. Ne remarquons-nous pas tous les jours, autour de nous, les animaux, muets jusqu’à l’époque de l’accouplement, sortir tout-à-coup de leur silence et faire retentir les airs de leurs bruyants éclats de voix? les oiseaux surtout trouvent des chants variés, des gazouillements délicieux, mais qui n’ont de durée que celle de la saison des amours.
Si l’on admet que le progrès, dans l’ordre intellectuel, est une loi de l’humanité, on peu aussi admettre que les hommes ne sont point sortis tout-à-coup de la terre, comme Minerv tout armée du front de Jupiter, c’est-à-dire aussi intelligents qu’ils le devinrent dans la suite des temps. A l’époque géologique où la première famille humaine parut sur le globe il ne devait point exister de langue parlée. C e nouveaux habitants, exclusivement guidés par des instincts de conservation et de reproduction, durent vivre longtemps dans un état sauvage. Voyez l’Histoire des métamorphoses humaines . Peut-être leur premier langage se réduisait-il à des cris comme le langage des animaux; ces cris devenant insuffisants pour exprimer des besoins, s’accroissant chaque jour, ils se servirent le la langue et des lèvres pour modifier des sons, jusque là gutturaux, et l’onomatopée leur fournit les premiers mots. Chaque individu, selon son intelligence et sa facilité d’imitation, inventa des sons, des mots dont l’harmonie se rapprochait plus ou moins des êtres, des objets qu’ils indiquaient. Ces sons, ces mots acceptés et reproduits par les membres d’une ou de plusieurs familles, s’augmentèrent d’autres sons, d’autres mots.
Le noyau du langage primitif alla toujours se grossissant, en raison de l’accroissement des familles et des besoins nouveaux; enfin, un homme plus intelligent parut un homme, qui, joignant au génie d’invention et de composition les règles naturelles de l’harmonie, réunit les mots déjà formés, en composa d’autres et forma un langue. Cette langue originelle marche, se modifie, suit l’homme pas à pas, progresse avec lui, en forme d’autres qui conservent plus ou moins de ressemblance avec elle; plus tard elle se délaie et disparaît au milieu des nombreux idiomes dont elle est la souche. Les langues naissent donc avec les sociétés, se développent, se perfectionnent ou se dégradent avec elles.
Mais à combien d’influences la voix et le langage ne furent-ils pas soumis: la situation topographique, la nature du sol, les climats, le mélange des races, les tempéraments, les idiosyncrasies, la vigueur ou la faiblesse de la constitution physique des hommes, leur état de civilisation ou de barbarie etc., etc. etc., dûrent nécessairement influer sur le langage et le timbre vocal. Ainsi, l’on observe constamment que la langue est plus sonore chez les peuples méridionaux que chez ceux du nord; la voix est douce, le langage agréable dans les contrées fertiles ou règne l’abondance et le bien-être; au contraire dans les lieux où la stérilité du terrain isole les hommes, la voix est âpre, criarde; la langue peu riche et monotone; car la misère est un obstacle au développement des facultés intellectuelles. La voix est plus rude dans les pays montagneux que dans les vallées; plus forte dans les campagnes que dans les villes, etc., etc.
Physiognomonie. — La parole et le timbre vocal considérés comme peignant les idées, les facultés et l’état moral de l’individu, sont une des meilleures indications physiognomoniques.