© 2018, Christian Valéry Nguembou Tagne
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Éditeur : BoD - Books on Demand GmbH,
12/14 rond-point des Champs Élysés, 75008 Paris
Impression : BoD - Books on Demand GmbH, Allemagne
ISBN : 978-2-322-08838-6
Dépôt légal : mars 2018
À la mémoire de
JEANNE KAMBOU
(1933 – 1995)
Comment définir rigoureusement le concept de point en géométrie ? Au premier abord, cette interrogation paraît inopportune, en tant que sa réponse semble évidente et triviale. Elle ne manque pas d’à-propos cependant, et s’inscrit à mon sens dans la problématique plus globale de la présentation des notions mathématiques à des publics nonexperts. Un regard serré sur les définitions familières, notamment sur celles proposées dans l’enseignement secondaire, permet de soutenir ce jugement.
En l’espèce, un manuel destiné aux collégiens, dans la section consacrée à la géométrie du plan, dicte :
« Le plan est une surface infinie. [...] Un point du plan est un lieu, un endroit qui n’a ni longueur ni épaisseur. »
Plus loin dans le même ouvrage, la notion de droite est introduite comme suit.
« Si l’on a marqué et nommé A et B deux points du plan, on peut tracer autant de traits que l’on veut : on obtient des lignes. Mais on ne peut (avec une règle) tracer qu’une seule droite passant par ces deux points. Cette droite est appelée la droite AB et on la note (AB).»
Ces définitions sont adossées aux sens courants des termes surface, infinité, lieu, endroit ou ligne. À ce titre, elles permettent une perception intuitive du plan, des points et droites. Toutefois, elles sont porteuses de confusion et de fragilité, eu égard à l’ambiguïté et à la versatilité des mots employés.
Ces définitions sont donc au fond inadaptées à la pratique des mathématiques, même élémentaires. En effet, par essence, la construction de raisonnements inductifs, déductifs et discursifs, est inhérente à la démarche mathématique. Elle exige robustesse des matériaux, précision des outils, et rigueur dans leur emploi.
Au demeurant, la seconde définition reprise ci-dessus associe l’existence d’une droite à un instrument matériel (la règle) et à une action concrète (tracer). Cette matérialisation de la droite, entité abstraite, s’il en est, est un élément supplémentaire de fragilisation de ladite définition. Elle se conjugue à l’imprécision de la terminologie, et instille l’idée fallacieuse que les concepts mathématiques trouvent toujours des manifestations perceptibles par les sens de l’humain.
De fait, les mathématiques ne sont pas assujetties au réel. Elles peuvent s’en inspirer certes. Dans cette optique, représentations graphiques et simulations peuvent être intégrées à un processus de recherche mathématique, non pas pour dégager des enseignements définitifs, mais pour stimuler et soutenir l’esprit qui, seul et en dernier ressort, va par le raisonnement tirer des conclusions valides. Les nombreux schémas et figures présents dans les textes sur la géométrie s’inscrivent dans cette perspective. Ils sont le tribut que l’humain doit parfois payer pour favoriser l’émancipation de l’esprit des pesanteurs du corps. À ce sujet, le philosophe français ÉMILE-AUGUSTE CHARTIER, dit ALAIN, dans son ouvrage Histoire de mes pensées (1936), écrit d’un ton juste et vibrant :
« La ligne droite n’est pas, je la trace parce que je la veux. La tracer est même une faiblesse. La droite est si belle par deux étoiles! L’esprit la soutient seul. »
En somme, pour rendre fidèlement l’essence des concepts mathématiques, les définitions doivent éviter les écueils de l’imprécision désinvolte et les périls de la matérialisation perfide. La démarche mathématique, fondée sur une logique et des structures formelles, offre le cadre de réalisation de ce dessein. Elle permet notamment la construction de terminologies précises.
Le présent texte est dédié à la géométrie euclidienne. Il en propose une vue frappée au coin du formalisme mathématique. Son écriture a été motivée par des discussions profanes sur la nature et les propriétés des points en géométrie. Ces échanges ont révélé en la matière le désir de discours à vocation universelle, dépassant l’horizon étroit des approches intuitives à la mode. En écho, ce texte est publié à l’adresse de ceux qui aspirent à un regard affiné sur la géométrie euclidienne. Il est également destiné aux élèves et enseignants des collèges et lycées. Puissent-ils y trouver des lumières ou de la substance pour exercer leur esprit critique.
L’ouvrage comporte trois chapitres et deux annexes.
Le premier chapitre propose une description succincte de la démarche mathématique. Il donne en outre des outils structurels nécessaires ou utiles à une pratique sereine et décomplexée de la géométrie euclidienne. Le deuxième chapitre présente et confronte deux approches différentes de cette matière : la vision originelle d’EUCLIDE datée vers l’an 300 avant notre ère et celle formalisée de DAVID HILBERT, publiée pour la première fois en 1899. Dans le sillage de l’approche de Hilbert, le troisième chapitre propose une construction rigoureuse de la distance entre les points de l’espace euclidien.
La première annexe présente les bases de l’approche vectorielle de la géométrie euclidienne, tandis que la seconde est dédiée à la résolution des exercices proposés dans le livre.
Francfort-sur-le-Main, le 29 mars 2018
Christian V. Nguembou Tagne i
i. Vous pouvez poser des questions, faire des commentaires, ou avoir des informations complémentaires à la page suivante : formalis-mathematica.net
Contrairement à Kronecker, pour fonder les mathématiques, je n’ai pas besoin de Dieu.
DAVID HILBERT
Chaque science se caractérise par ses objets et ses méthodes. Les mathématiques se distinguent des autres disciplines scientifiques non seulement par la nature abstraite de leurs objets, mais surtout par le formalisme de leurs méthodes. Ce formalisme s’exprime notamment par l’usage de la logique et de la théorie des ensembles, qui sont au cœur de la démarche mathématique, sujet du présent chapitre.
Ce dernier est constitué de trois sections. La première décrit les trois phases de la démarche mathématique. La logique et la théorie des ensembles sont des disciplines riches et complexes. Les deuxième et troisième sections en donne toutefois des descriptions succinctes, pour une meilleure intelligence de la démarche mathématique.
Dans la pratique, les théories mathématiques se bâtissent par une méthode en trois étapes. Axiomatisation, explication et développement sont les phases de ce triptyque.
L’axiomatisation est l’étape préliminaire de la démarche mathématique. Elle a deux desseins : définir les objets et concepts de base, puis formuler les lois consubstantielles à ceux-ci. Ces lois ontologiques sont appelées axiomes. La phase d’axiomatisation trace un canevas et met sur pied une fondation sur laquelle sera érigée une théorie. La validité et la robustesse de la théorie à naître est tributaire de la pertinence, de la cohérence et de la consistance du système d’axiomes.
L’explication intervient à la suite de l’axiomatisation. C’est la phase d’imprégnation. Elle vise principalement la familiarisation avec les objets et concepts de base, notamment par des exemples ou par la confrontation avec des éléments d’autres théories. Par ailleurs, elle doit permettre d’éprouver la pertinence, la cohérence et la consistance du canevas axiomatique, autant que faire se peut.
Le développement, phase ultime de la démarche mathématique, consiste en trois actions :
De telles lois, déduites des définitions et axiomes, sont appelées propositions, corollaires, lemmes ou théorèmes, selon leur portée dans la théorie.
La pensée est le ressort du cheminement mathématique. Ses formes peuvent être classées en trois catégories, en miroir des opérations du jugement que sont l’abduction (ou intuition), l’induction et la déduction. Ces dernières interviennent dans la démarche mathématique à des degrés divers.
Schéma 1.1 – Les trois phases de la démarche mathématique
Précisément, le mathématicien élabore des hypothèses dans la phase d’axiomatisation, puis les met à l’épreuve dans la phase d’explication, et enfin explore leurs conséquences dans la phase de développement. L’élaboration des hypothèses est de l’ordre de l’intuition, la mise à l’épreuve du ressort de l’induction, et l’exploration du domaine de la déduction.
Les mathématiques sont donc une discipline d’exploration d’hypothèses : une science hypothético-déductive. La logique y joue un rôle majeur. En effet, elle met à disposition des langages pour la définition rigoureuse des objets et la formulation précise des concepts et lois, puis édicte les règles de déduction.
La formalisation des actions de l’esprit est un principe essentiel de la pensée mathématique. Cette dernière repose sur quatre actions fondatrices : identification, formation de collections, mise en relation et mise en correspondance.
Les objets mathématiques peuvent être variables ou constants. Leur identification se réalise au moyen de symboles.
Une variable est un symbole représentant un objet inconnu ou un objet quelconque d’une nature déterminée. Une constante est un symbole désignant un objet précisément défini.
Le symbolisme mathématique n’est pas soumis à une réglementation universelle. Le respect de certains usages est toutefois recommandé. Les symboles 0, 1, 2, 3, . . . , 9 désignent notamment les dix premiers nombres entiers naturels. Au demeurant, pour la représentation des variables et constantes, la coutume préconise l’utilisation des lettres minuscules et majuscules des alphabets latin et grec. Chacune de ces lettres peut par ailleurs être indexée ou accentuée, et générer des symboles tels que x0, x1 et x2, puis y′ et y′′, etc. Un stock illimité de symboles est ainsi constitué.
Tableau 1.1 – L’alphabet grec
Des symboles distincts peuvent désigner le même objet. Le signe d’égalité (=) permet le cas échéant de le signaler. Par exemple, l’expression x = y signifie que les symboles x et y désigne le même objet. En miroir, la différence entre deux objets A et B se symbolise par A ≠ B.
Des objets identifiés peuvent être organisés en collections.
Une collection est une entité réunissant en son sein des objets déterminés. Les symboles d’appartenance (∈) et de non-appartenance (∉) permettent d’exprimer le rapport entre un objet et une collection donnés. Précisément, pour un objet x et une collection C, le libellé x ∈ C signifie que x appartient à C. Du reste, la formule x ∉ C exprime que l’objet x n’est pas un élément de la collection C.
Les symboles indexés x1, . . . , xn désignant n objets, la collection constitué de ces dernier est symbolisée par {x1, . . . , xn}. Ainsi, la formule C = {x1, . . . , xn} signifie que C est la collection constituée des objets x1, . . . , xn.
Les collections peuvent être mis en relation par la création d’un nouveau type d’objets : les n-uplets.
Pour chaque nombre entier naturel n distinct de 0 et de 1, et pour des objets x1, . . . , xn, un nouvel objet, symbolisé par (x1, . . . , xn), appelé n-uplet, est défini. Dans le cas particulier n = 2, le 2-uplet (x1, x2) est appelé couple. Dans le même esprit, (x1, x2, x3) est un triplet, (x1, x2, x3, x4) est un quadruplet, etc.
Des collections C1, . . . , Cn étant données, toute collection constituée de n-uplets (x1, . . . , xn) tels que x1 ∈ C1, . . . , et xn ∈ Cn, est appelée relation n-aire entre les collections C1, . . . , Cn. L’ordre de citation des collections doit ici être conforme l’ordre d’apparition de leurs objets dans les n-uplets de la relation.
Dans le cas particulier n = 2, cet ordre s’exprime autrement. Précisément, toute collection R constituée de couples (x1, x2), avec x1 ∈ C1 et x2 ∈ C2, est appelée relation binaire de C1 vers C2. En l’occurrence, un objet x1 de C1 est en relation avec un objet x2 de C2 via R lorsque (x1, x2) ∈ R. Ce fait peut également être symbolisé par x1Rx2. Cette dernière notation met en exergue le caractère liant de la relation : elle affiche explicitement que l’objet relationnel R assure la liaison entre x1 et x2. Dans le cas d’espèce, la collection C1 est dite de départ, tandis que C2 est appelée collection d’arrivée de R.
Toute relation binaire contraignante pour les objets de la collection de départ, et subordonnée au principe d’exclusivité pour la liaison avec les objets de la collection d’arrivée, est une correspondance.
Précisément, une relation binaire C d’une collection A vers une collection B est appelée correspondance de A vers B si, pour chaque objet a de A, il existe un et un seul objet b de B tel aCb, c’est-à-dire (a, b) ∈ C. Le cas échéant, la notation b = C(a) est adoptée en lieu et place de aCb ou (a, b) ∈ C. La coutume commande alors de dire que b est l’image de a par la correspondance C, ou que a est un antécédent de b par C. Si au demeurant la collection A de départ est constituée de n-uplets, alors la correspondance C est dite de n variables, et la notation C(x1, . . . , x1) désigne l’image d’un n-uplet (x1, . . . , xn) par C. Autrement, C est une correspondance d’une variable.
La logique mathématique est un système de langages formels fondés sur les quatre principes ci-dessus évoqués ; à savoir : identification (variables et constantes), formation de collections, mise en relation et mise en correspondance. Ces langages formels, au même titre que la langue française, ont une syntaxe et une sémantique. Les règles syntaxiques régissent la rédaction des textes. La sémantique cependant, par un principe clair de contextualisation et de rigoureuses règles d’interprétation, encadre le raisonnement.
Chaque langage formel est constitué d’un alphabet,de termes et d’expressions. Toutefois, les termes ne sont pas tirés d’un dictionnaire à proprement parler, mais sont formés à partir de symboles de l’alphabet, dans le respect de règles précises. De même, les expressions, qui sont comparables aux phrases de la langue courante, se construisent avec des termes, dans le cadre de lois déterminées. Avant la présentation des règles de formation des termes et de construction des expressions, il sied de décrire l’alphabet des langages formels.
L’alphabet d’un langage formel est constitué des symboles suivants :
Les symboles des cinq premières catégories sont structurels, au sens où ils appartiennent à tous les langages formels. Ceux de la sixième catégorie sont circonstanciels ou conjoncturels, car ils peuvent varier d’un langage à l’autre. Mieux, un langage formel dépourvu de symboles de cette dernière catégorie est théoriquement concevable.
Tableau 1.2 – Traductions littérales des connecteurs logiques et quantificateurs
Symboles | Traductions littérales | |
Connecteurs logiques | ¬ | non |
∨ | ou | |
∧ | et | |
⇒ | si . . . alors | |
⇔ | si et seulement si | |
Quantificateurs | ∀ | pour tout |
∃ | il existe |
Les termes d’un langage formel sont déterminés par les trois règles suivantes :
(Τ1) Toute variable est un terme.
(Τ2) Tout symbole de constante est un terme.
(Τ3) Si t1, . . . , tn sont des termes et C un symbole de correspondance de n variables, alors C(t1, . . . , tn) est un terme.
Les termes des langages formels sont ainsi définis avec précision. Ceux obtenus des deux premières règles, à savoir les symboles de variables et de constantes, sont dit élémentaires. La troisième règle permet par induction, à partir de termes élémentaires ou déjà connus, d’en former de nouveaux. La définition des expressions intègre également ce principe d’induction.
Les expressions (ou formules) d’un langage formel sont déterminées par les cinq règles suivantes :
(ɛ1) Si t1 et t2 sont des termes, alors t1 = t2 et t1 ∈ t2 sont des expressions.
(ɛ2) Si t1, . . . , tn sont des termes et R un symbole de relation n-aire, alors (t1, . . . , tn) ∈ R est une expression; pour n = 2 en particulier, t1Rt2 est une expression.
(ɛ3) Si p est une expression, alors ¬p est une expression.
(ɛ4) Si p et q sont des expressions, alors (p ∧ q), (p ∨ q), (p ⇒ q) et (p ⇔ q) sont des expressions.
(ɛ5) Si x et S sont des variables et p une expression, alors
(∀x ∈ S)p et (∃x ∈ S) p
sont des expressions.
Les suites de symboles obtenues selon les préceptes ci-dessus édictés sont des expressions ou formules syntaxiquement correctes. Elles peuvent être classées en quatre catégories.
Les expressions livrées par les règles (ɛ1) et (ɛ2) sont dites atomiques. Celles déduites de la règle (ɛ3) sont appelées négations.Les expressions connectées sont celles obtenues par la régle (ɛ4). L’usage de la règle (ɛ5) produit des expressions quantifiées.
Tableau 1.3 – Noms des expressions composées
Expressions | Noms |
¬p | négation de p |
p ∨ q | disjonction de p et q |
p ∧ q | conjonction de p et q |
p ⇒ q | implication de p vers q |
p ⇔ q | équivalence de p et q |
Dans les langages formels, les règles de formation des termes et de construction des expressions ont un caractère automatique très marqué. Elles sont fortement contraignantes, contrairement aux règles de la langue française qui, dans la rédaction des phrases, laissent une certaine latitude. Rigueur et précision sont les bénéfices de ces contraintes. Cette réalité fait que les mathématiciens parlent de calcul pour désigner tout processus de composition de termes et d’expressions des langages formels.
Des exemples permettent de se familiariser avec la mécanique de ce calcul. À cet effet, soit le langage formel dont l’alphabet n’est constitué que des symboles structurels ; à savoir : signes délimiteurs, symboles d’égalité et d’appartenance, connecteurs logiques, quantificateurs et variables. L’alphabet du langage formel
ne contient donc pas de symboles de constante, de relation ou de correspondance. Par conséquent, les variables sont les seuls termes de
.
Soient et X, puis Y et a, de telles variables. Alors, a ∈ X, puis a ∈ Y et X = Y sont des expressions atomiques de
. Au compte des règles de calcul (ɛ4) et (ɛ5) à la page →, il en résulte l’implication
désignée ici par p, ainsi que l’expression quantifiée
Du reste, la règle (E3) livre la négation (a ∈ X). L’expression
est de ce fait syntaxiquement correcte. Par ailleurs, si Z est une variable, alors la formule
symbolisée ici par q, est valide dans le langage . Il en est de même pour l’expression
En l’état, ces expressions ne sont que des suites de symboles sans signification. Elles ne prendront du sens que dans un contexte. Les modalités de la contextualisation sont du ressort de la sémantique.
En amont de la définition de la notion de contexte, il est utile de faire des précisions relatives aux collections, relations et correspondances.
Une collection est appelée sous-collection d’une seconde collection lorsque chaque élément de la première appartient également à la seconde.
Toute relation n-aire entre des collections C1, . . . , Cn peut également être nommée relation n-aire sur une collection si C1, . . . , et Cn sont des sous-collections de
. Dans le même esprit, une correspondance de C1 vers C2 peut être appelée correspondance sur
si C1 et C2 sont des sous-collections de
, ou si C1 est une relation n-aire sur
et C2 est une sous-collection de
.
À présent, soit L un langage formel. Les symboles conjoncturels de L sont alors regroupés dans une collection désignée par . Par ailleurs, soit
une collection d’objets telle que les conditions suivantes soient vérifiées :
Alors, une telle collection , munie de ces constantes, correspondances et relations (dont les noms sont contenus
), dans est appelée contexte associé au langage L, ou L-contexte, ou encore L-structure.
Par exemple, toute collection d’objets est un contexte du langage formel primaire (celui dont l’alphabet ne contient que les symboles structurels). Cette observation coule de source.
La notion de contexte, définie ci-dessus, révèle un raffinement des langages formels. Elle souligne la différence entre le nom d’un objet, qui est un symbole, et l’objet proprement dit, qui est un ensemble de propriétés et caractéristiques le décrivant. Il en est de même pour les relations et correspondances. Les exemples ci-dessus, construits autour de la collection des nombres entiers naturels, permettent un meilleur entendement de ce principe.
Les nombres entiers naturels sont une chaîne se déroulant du plus petit à l’infini. Cet enchainement produit une relation binaire, appelée ordre naturel, sur la collection des nombres entiers naturels. Cet ordre met en exergue un plus petit élément. Dans cette chaîne, l’élément qui suit directement un nombre n est appelé successeur de n. En miroir, n est le prédécesseur de ce dernier.
La collection des nombres entiers naturels est d’un type particulier, examiné dans la section dédiée à la théorie des ensembles.
Soit L1 un langage formel dont les symboles conjoncturels sont contenus dans , où 0 est un symbole de constante et + un symbole de correspondance de deux variables. Par ailleurs, soit C la collection des nombres entiers naturels, et P la collection des couples (x1, x2) tels que x1 ∈ C et x2 ∈ C. Au demeurant, le plus petit entier naturel est désigné par 0. Du reste, + symbolise la correspondance de P vers C, associant à tout couple (x1, x2) la somme des nombres x1 et x2. Selon un certain usage, cette correspondance se représente aussi de manière schématique comme suit :
+ : P → C, (x1, x2) x1 + x2,
où le terme simplifié x1 + x2 est utilisé en lieu et place de +(x1, x2). Alors, + est une correspondance sur C. Par conséquent, le triplet (C, 0, +), c’est-à-dire la collection C, muni de 0 et de +, est un contexte associé au langage L1.
À présent, soit L2 un langage formel déterminé par
où 0 et 1 sont des symboles de constantes, ≤ un symbole de relation binaire, + et × des symboles de correspondances. Comme précédemment, la lettre C symbolise ici la collection des nombres entiers naturels, tandis que P désigne la collection de tous couples de nombres entiers naturels. De plus, 0 représente le plus petit nombre entier naturel et 1 son successeur. En outre, la relation d’ordre naturel sur C est notée ≤. Au demeurant, les signes + et × symbolisent respectivement l’addition et la multiplication des nombres entiers. Précisément, + et × sont des correspondances définies comme suit :
+ : P → C, (x1, x2) x1 + x2
et
× : P → C, (x1, x2) x1 × x2.
Alors, (C, 0, 1, ≤, +, ×) est un contexte associé au langage L2.
Les exemples précédents montrent que la contextualisation d’un langage se fait d’une part par le choix d’objets, puis d’autre part, le cas échéant, par l’association de chaque symbole conjoncturel à une entité (objet, relation, correspondance) liée à la collection des objets choisis.
Chaque expression d’un langage formel contextualisé se prête à une interprétation précise et unique. Une assertion est une expression associée à son interprétation dans un contexte déterminé.
La définition en catégories des expressions suggère de distinguer quatre types d’assertions; à savoir : les assertions atomiques, les négations, les assertions connectées et les assertions quantifiées.
Les assertions atomiques sont celles déduites d’expressions de la forme
t1 = t2, t1 ∈ t2 et R(t1, . . . , tn),
où t1, . . . , tn sont des termes et R un symbole de relation n-aire.
Les négations sont des assertions découlant d’expressions de la forme ¬p, où p est une assertion.
Les assertions connectées sont celles obtenues d’expressions de la forme
p ∨ q, p ∧ q, p ⇒ q ou p ⇔ q,
où p et q sont des expressions. Elles sont respectivement appelées disjonction, conjonction, implication ou équivalence, conformément au nom de l’expression sous-jacente.
Les assertions quantifiées sont celles résultant d’expressions de la forme
(∀x ∈ S) p ou (∃x ∈ S) p,
où x et S sont des variables et p une assertion.